La persécution des chrétiens du Siam.

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Un triste épisode peu connu de la guerre franco-siamoise de 1940-41 :

La persécution des chrétiens du Siam.

     Les défaites de la France et de la Grande-Bretagne dans l’Europe de 1940 ont provoqué l’effacement de leur influence sur le théâtre asiatique.
Le Siam va alors chercher à se rapprocher du Japon, nouvelle puissance de la région.
Il va également profiter de l’affaiblissement de la France et de la perte de son prestige auprès des populations protégées de l’Union Indochinoise, pour relancer le problème de ses frontières avec le Laos et le Cambodge. Les douloureuses concessions territoriales et retraits de 1905 et 1907 ne sont toujours pas oubliés.
Nouvel homme fort du régime à Bangkok, le premier ministre Plaek Phibulsongkram lançait son pays dans une ère de changement. Le Siam devenait Thaïlande en 1939, un ordre nouveau était instauré et le pays devait se retrouver rassemblé autour d’un nouveau nationalisme culturel et religieux.
Le bouddhisme devait être respecté par tous, et les autres religions devenaient suspectes.
Le catholicisme en particulier, religion de l’ennemi français, va être pourchassé. D’autant plus, qu’il est solidement installé dans la région du Nord-Est (pays Isan), où les populations d’origine lao sont nombreuses et qui est au premier plan face aux troupes ennemies indochinoises installées sur l’autre rive du Mékong.
Dès l’automne 1940, une série d’incidents et de coups de main opposera les deux protagonistes, retranchés de chaque côté du grand fleuve. Pour les autorités siamoises, les communautés chrétiennes aident de leurs renseignements les troupes ennemies et sont donc suspectes.
Les missionnaires français seront persécutés : les Révérends Pères Chancelière, Ollier et Tapir seront molestés. Le Père Durand, pourtant âgé de 63 ans, sera jeté en prison.
Spectacle odieux, certains seront promenés dans des cages et livrés aux injures d’un public goguenard. La majorité d’entre eux seront expulsés vers Saïgon.

Les Sept martyrs de Ban Song Khon.

  Portraits des sept martyrs.
Autour de Philippe, Marguerite, Lucie, Agathe,
Cécile, Bibiana (Viviane?)  et Marie.

     Mais le plus horrible allait survenir dans la région Isan à Ban Song Khon, près de Mukdahan, au bord du Mékong. Le Père Paul Figet, responsable religieux de la région, avait été expulsé, mais les villageois demeuraient fidèles à leur foi chrétienne.

La police locale alors intervint et accusa l‘instituteur de la paroisse, le pauvre Philippe Siphong Onphitak de continuer à encourager les villageois dans leur croyance.
Il fut alors tué par les policiers le 16 décembre. Il avait 33 ans.
Outrés par cet assassinat, les villageois se regroupèrent autour de leur église et de deux sœurs de la Sainte Croix, sœur Agnès Phila et sœur Lucia Khambang. Bousculées et harcelées par leurs bourreaux, elles refusèrent de renier leur foi.
Et c’est le lendemain de Noël, le 26 décembre 1940 qu’elles furent emmenées vers le cimetière du village où elles furent fusillées, en compagnie d’une croyante et de trois jeunes chrétiennes de 14, 15 et 16 ans.
Connus désormais pour toujours sous le nom des 7 martyrs de Song Khon, ils seront béatifiés le 22 octobre 1989 par le pape Jean Paul II.

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Le mausolée de Ban Song Khon.

     Un imposant mausolée de porphyre rouge contenant les représentations momifiées des victimes sera construit à l’emplacement de leur martyre, 25 km au nord de Mukdahan.

3Représentation du supplice des martyrs.

 Le Père Nicolas Bunkert Kitbamrung.

     Xun Kim Kitbamrung est né le 31 janvier 1895 dans le district de Sam Phran, près de Nakorn Pathom. Il sera baptisé la même année dans l’église Saint Pierre qui rassemble la très importante communauté catholique de cette région.
Il s’appellera désormais Nicolas Bunkert.

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Statue du Bienheureux Nicolas Bunkert.

     Après sa sortie du séminaire de Penang, il sera ordonné prêtre dans la cathédrale de l’Assomption de Bangkok en 1926. Après différentes missions d’évangélisation dans les provinces du Nord et de la frontière birmane, il sera nommé à Korat en 1937.
Puis viendront les années sombres de la guerre franco-siamoise. Les catholiques sont rapidement considérés comme une ‘cinquième colonne’ à la solde du renseignement de l’ennemi.

Le Père Nicolas est arrêté le 12 janvier 1941 dans l’église Saint Joseph de Ban Han.
Il est ramené à Bangkok, condamné à 15 ans de prison et interné dans la prison de Bang Khwang.
Malgré les efforts de Mgr Perros, il ne sera pas libéré et souffrira de conditions d’incarcération particulièrement difficiles. Il contactera une pneumonie et décèdera en février 1944.
Il sera béatifié le 05 mars 2000 par le Pape Jean-Paul II.
En 2001, toutes les autorités religieuses du pays convergèrent vers Sam Phran, près de Nakorn Pathom, là où Nicolas fut baptisé, et où fut inauguré près de l’église un monument à sa mémoire.

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L’église Saint Pierre de Sam Phran.                                                                                                                      Le clocher et le cimetière.

     L’église moderne est très vaste, surmontée d’une croix immense.
Dans le chœur, derrière l’autel, a été placée une châsse vitrée, contenant une réplique du gisant du Bienheureux.

7Le chœur, l’autel, et le gisant du Bienheureux Nicolas.

Derrière l’abside, le visiteur peut découvrir un intéressant musée qui présente un historique de la chrétienté en Thaïlande, et plusieurs objets de culte anciens et livres et reliques diverses.

8Le cimetière de Sam Phran.

     Non loin de cette église Saint Pierre, se trouvent deux gigantesques cimetières catholiques. On y retrouve les tombes des missionnaires français décédés dans nos régions et, rassemblés dans des loculi, les restes des tombes déménagées depuis le cimetière catholique de Silom Road, lors d’un épisode qui avait choqué la communauté catholique de la ville. On y retrouve avec émotion les tombes des familles Coedès ou encore Lingat, mais aussi des marins décédés sur la Vipère ou le Lutin, lorsque ces navires étaient à poste à Bangkok au changement de siècle.

9Les plaques posées devant les loculi du cimetière de Santikham.

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Le grand cimetière de Santikham

 

 

François Doré.
Le Souvenir Français de Thaïlande.

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